Jean-Luc Godard : S'il y a un cinéaste qui aurait pu "réaliser" Proust à l'écran, c'est Hitchcock. Mais il n'a pas eu besoin de le faire, parce que c'est cela qu'il faisait

"S'il y a un cinéaste qui aurait pu "réaliser" Proust à l'écran, c'est Hitchcock. Mais il n'a pas eu besoin de le faire, parce que c'est cela qu'il faisait. C'était un type assez curieux qui a toujours emprisonné ses actrices en leur faisant signer des contrats de huit ans et en ne leur faisant rien faire. [Cf Albertine dans La Prisonnière]"

Jean-Luc Godard, Libération, 2 mai 1980, entretien avec Serge July

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à la recherche de la disparue : Hitchcock, VERTIGO (Sueurs froides)

"Et une fois de plus j'éprouvais d'abord que le souvenir n'est pas inventif, qu'il est impuissant à désirer rien d'autre, même rien de mieux que ce que nous avons possédé ; ensuite qu'il est spirituel, de sorte que la réalité ne peut lui fournir l'état qu'il cherche ; enfin que, s'appliquant à une personne morte, la renaissance qu'il incarne est moins celle du besoin d'aimer, auquel il fait croire, que celle du besoin de l'absente. De sorte que la ressemblance avec Albertine, de la femme que j'avais choisie, la ressemblance même, si j'arrivais à l'obtenir, de sa tendresse avec celle d'Albertine, ne me faisaient que mieux sentir l'absence de ce que j'avais, sans le savoir, cherché, de ce qui était indispensable pour que renaquît mon bonheur, c'est-à-dire Albertine elle-même, le temps que nous avions vécu ensemble, le passé à la recherche duquel j'étais sans le savoir."

Marcel Proust, Albertine disparue

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"Jean-Luc Godard envisageait d'autres films que nous ferions ensemble. Il rêva d'adapter La Prisonnière d'après Marcel Proust. Malheureusement, sa nièce et héritière, Mme Mante, lui répondit avec une extrême courtoisie que "c'était au-dessus de ses moyens" et qu'elle songeait à Visconti ou à Joseph Losey. Jean-Luc fut déçu."

Anne Wiazemsky, Une année studieuse, Gallimard