III Un matin, le père Rouault vint apporter à Charles le payement de sa jambe remise : soixante et quinze francs en pièces de quarante sous, et une dinde. Il avait appris son malheur, et l’en consola tant qu’il put. — Je sais ce que c’est ! disait-il en lui frappant sur l’épaule ; j’ai été comme vous, moi aussi ! Quand j’ai eu perdu ma pauvre défunte, j’allais dans les champs pour être tout seul ; je tombais au pied d’un arbre, je pleurais, j’appelais le bon Dieu, je lui disais des sottises ; j’aurais voulu être comme les taupes, que je voyais aux branches, qui avaient des vers leur grouillant dans le ventre, crevé, enfin. Et quand je pensais que d’autres, à ce moment-là, étaient avec leurs bonnes petites femmes à les tenir embrassées contre eux, je tapais de grands coups par terre avec mon bâton ; j’étais quasiment fou, que je ne mangeais plus ; l’idée d’aller seulement au café me dégoûtait, vous ne croiriez pas. Eh bien, tout doucement, un jour chassant l’autre, un printemps sur un hiver et un automne par-dessus un été, ça a coulé brin à brin, miette à miette ; ça s’en est allé, c’est parti, c’est descendu, je veux dire, car il vous reste toujours quelque chose au fond, comme qui dirait… un poids, là, sur la poitrine ! Mais puisque c’est notre sort à tous, on ne doit pas non plus se laisser dépérir, et, parce que d’autres sont morts vouloir mourir… Il faut vous secouer, monsieur Bovary ; ça se passera ! Venez nous voir ; ma fille pense à vous de temps à autre, savez-vous bien, et elle dit comme ça que vous l’oubliez. Voilà le printemps bientôt ; nous vous ferons tirer un lapin dans la garenne, pour vous dissiper un peu. Charles suivit son conseil. Il retourna aux Bertaux ; il retrouva tout comme la veille, comme il y avait cinq mois, c’est-à-dire. Les poiriers déjà étaient en fleur, et le bonhomme Rouault, debout maintenant, allait et venait, ce qui rendait la ferme plus animée. Croyant qu’il était de son devoir de prodiguer au médecin le plus de politesses possible, à cause de sa position douloureuse, il le pria de ne point se découvrir la tête, lui parla à voix basse, comme s’il eût été malade, et même fit semblant de se mettre en colère de ce que l’on n’avait pas apprêté à son intention quelque chose d’un peu plus léger que tout le reste, tels que des petits pots de crème ou des poires cuites. Il conta des histoires. Charles se surprit à rire ; mais le souvenir de sa femme, lui revenant tout à coup, l’assombrit. On apporta le café ; il n’y pensa plus. Il y pensa moins, à mesure qu’il s’habituait à vivre seul. L’agrément nouveau de l’indépendance lui rendit bientôt la solitude plus supportable. Il pouvait changer maintenant les heures de ses repas, rentrer ou sortir sans donner de raisons, et, lorsqu’il était bien fatigué, s’étendre de ses quatre membres, tout en large dans son lit. Donc, il se choya, se dorlota et accepta les consolations qu’on lui donnait. D’autre part, la mort de sa femme ne l’avait pas mal servi dans son métier, car on avait répété durant un mois : « Ce pauvre jeune homme ! quel malheur ! » Son nom s’était répandu, sa clientèle s’était accrue ; et puis il allait aux Bertaux tout à son aise. Il avait un espoir sans but, un bonheur vague ; il se trouvait la figure plus agréable en brossant ses favoris devant son miroir. Il arriva un jour vers trois heures ; tout le monde était aux champs ; il entra dans la cuisine, mais n’aperçut point d’abord Emma ; les auvents étaient fermés. Par les fentes du bois, le soleil allongeait sur les pavés de grandes raies minces, qui se brisaient à l’angle des meubles et tremblaient au plafond. Des mouches, sur la table, montaient le long des verres qui avaient servi, et bourdonnaient en se noyant au fond, dans le cidre resté. Le jour qui descendait par la cheminée, veloutant la suie de la plaque, bleuissait un peu les cendres froides. Entre la fenêtre et le foyer, Emma cousait ; elle n’avait point de fichu, on voyait sur ses épaules nues de petites gouttes de sueur. Selon la mode de la campagne, elle lui proposa de boire quelque chose. Il refusa, elle insista, et enfin lui offrit, en riant, de prendre un verre de liqueur avec elle. Elle alla donc chercher dans l’armoire une bouteille de curaçao, atteignit deux petits verres, emplit l’un jusqu’au bord, versa à peine dans l’autre, et, après avoir trinqué, le porta à sa bouche. Comme il était presque vide, elle se renversait pour boire ; et, la tête en arrière, les lèvres avancées, le cou tendu, elle riait de ne rien sentir, tandis que le bout de la langue, passant entre ses dents fines, léchait à petits coups le fond du verre. Elle se rassit et elle reprit son ouvrage, qui était un bas de coton blanc où elle faisait des reprises : elle travaillait le front baissé ; elle ne parlait pas, Charles non plus. L’air, passant par le dessous de la porte, poussait un peu de poussière sur les dalles ; il la regardait se traîner, et il entendait seulement le battement intérieur de sa tête, avec le cri d’une poule, au loin, qui pondait dans les cours. Emma, de temps à autre, se rafraîchissait les joues en y appliquant la paume de ses mains, qu’elle refroidissait après cela sur la pomme de fer des grands chenets. Elle se plaignait d’éprouver, depuis le commencement de la saison, des étourdissements ; elle demanda si les bains de mer lui seraient utiles ; elle se mit à causer du couvent, Charles de son collège, les phrases leur vinrent. Ils montèrent dans sa chambre. Elle lui fit voir ses anciens cahiers de musique, les petits livres qu’on lui avait donnés en prix et les couronnes en feuilles de chêne, abandonnées dans un bas d’armoire. Elle lui parla encore de sa mère, du cimetière, et même lui montra dans le jardin la plate-bande dont elle cueillait les fleurs, tous les premiers vendredis de chaque mois, pour les aller mettre sur sa tombe. Mais le jardinier qu’ils avaient n’y entendait rien ; on était si mal servi ! Elle eût bien voulu, ne fût-ce au moins que pendant l’hiver, habiter la ville, quoique la longueur des beaux jours rendît peut-être la campagne plus ennuyeuse encore durant l’été ; — et, selon ce qu’elle disait, sa voix était claire, aiguë, ou, se couvrant de langueur tout à coup, traînait des modulations qui finissaient presque en murmures, quand elle se parlait à elle-même, — tantôt joyeuse, ouvrant des yeux naïfs, puis les paupières à demi closes, le regard noyé d’ennui, la pensée vagabondant. Le soir, en s’en retournant, Charles reprit une à une les phrases qu’elle avait dites, tâchant de se les rappeler, d’en compléter le sens, afin de se faire la portion d’existence qu’elle avait vécu dans le temps qu’il ne la connaissait pas encore. Mais jamais il ne put la voir, en sa pensée, différemment qu’il ne l’avait vue la première fois, ou telle qu’il venait de la quitter tout à l’heure. Puis il se demanda ce qu’elle deviendrait, si elle se marierait, et à qui ? hélas ! le père Rouault était bien riche, et elle !… si belle ! Mais la figure d’Emma revenait toujours se placer devant ses yeux, et quelque chose de monotone comme le ronflement d’une toupie bourdonnait à ses oreilles : « Si tu te mariais, pourtant ! si tu te mariais ! » La nuit, il ne dormit pas, sa gorge était serrée, il avait soif ; il se leva pour aller boire à son pot à l’eau et il ouvrit la fenêtre ; le ciel était couvert d’étoiles, un vent chaud passait, au loin des chiens aboyaient. Il tourna la tête du côté des Bertaux. Pensant qu’après tout l’on ne risquait rien, Charles se promit de faire la demande quand l’occasion s’en offrirait ; mais, chaque fois qu’elle s’offrit, la peur de ne point trouver les mots convenables lui collait les lèvres. Le père Rouault n’eût pas été fâché qu’on le débarrassât de sa fille, qui ne lui servait guère dans sa maison. Il l’excusait intérieurement, trouvant qu’elle avait trop d’esprit pour la culture, métier maudit du ciel, puisqu’on n’y voyait jamais de millionnaire. Loin d’y avoir fait fortune, le bonhomme y perdait tous les ans ; car, s’il excellait dans les marchés, où il se plaisait aux ruses du métier, en revanche la culture proprement dite, avec le gouvernement intérieur de la ferme, lui convenait moins qu’à personne. Il ne retirait pas volontiers ses mains de dedans ses poches, et n’épargnait point la dépense pour tout ce qui regardait sa vie, voulant être bien nourri, bien chauffé, bien couché. Il aimait le gros cidre, les gigots saignants, les glorias longuement battus. Il prenait ses repas dans la cuisine, seul, en face du feu, sur une petite table qu’on lui apportait toute servie, comme au théâtre. Lorsqu’il s’aperçut donc que Charles avait les pommettes rouges près de sa fille, ce qui signifiait qu’un de ces jours on la lui demanderait en mariage, il rumina d’avance toute l’affaire. Il le trouvait bien un peu gringalet, et ce n’était pas là un gendre comme il l’eût souhaité ; mais on le disait de bonne conduite, économe, fort instruit, et sans doute qu’il ne chicanerait pas trop sur la dot. Or, comme le père Rouault allait être forcé de vendre vingt-deux acres de son bien, qu’il devait beaucoup au maçon, beaucoup au bourrelier, que l’arbre du pressoir était à remettre : — S’il me la demande, se dit-il, je la lui donne. À l’époque de la Saint-Michel, Charles était venu passer trois jours aux Bertaux. La dernière journée s’était écoulée comme les précédentes, à reculer de quart d’heure en quart d’heure. Le père Rouault lui fit la conduite ; ils marchaient dans un chemin creux, ils s’allaient quitter ; c’était le moment. Charles se donna jusqu’au coin de la haie, et enfin, quand on l’eut dépassée : — Maître Rouault, murmura-t-il, je voudrais bien vous dire quelque chose. Ils s’arrêtèrent. Charles se taisait. — Mais contez-moi votre histoire ! est-ce que je ne sais pas tout ? dit le père Rouault, en riant doucement. — Père Rouault…, père Rouault…, balbutia Charles. — Moi, je ne demande pas mieux, continua le fermier. Quoique sans doute la petite soit de mon idée, il faut pourtant lui demander son avis. Allez-vous en donc ; je m’en vais retourner chez nous. Si c’est oui, entendez-moi bien, vous n’aurez pas besoin de revenir, à cause du monde, et, d’ailleurs, ça la saisirait trop. Mais pour que vous ne vous mangiez pas le sang, je pousserai tout grand l’auvent de la fenêtre contre le mur : vous pourrez le voir par derrière, en vous penchant sur la haie. Et il s’éloigna. Charles attacha son cheval à un arbre. Il courut se mettre dans le sentier ; il attendit. Une demi-heure se passa, puis il compta dix-neuf minutes à sa montre. Tout à coup un bruit se fit contre le mur ; l’auvent s’était rabattu, la cliquette tremblait encore. Le lendemain, dès neuf heures, il était à la ferme. Emma rougit quand il entra, tout en s’efforçant de rire un peu, par contenance. Le père Rouault embrassa son futur gendre. On remit à causer des arrangements d’intérêt ; on avait, d’ailleurs, du temps devant soi, puisque le mariage ne pouvait décemment avoir lieu avant la fin du deuil de Charles, c’est-à-dire vers le printemps de l’année prochaine. L’hiver se passa dans cette attente. Mlle Rouault s’occupa de son trousseau. Une partie en fut commandée à Rouen, et elle se confectionna des chemises et des bonnets de nuit, d’après des dessins de modes qu’elle emprunta. Dans les visites que Charles faisait à la ferme, on causait des préparatifs de la noce, on se demandait dans quel appartement se donnerait le dîner ; on rêvait à la quantité de plats qu’il faudrait et quelles seraient les entrées. Emma eût, au contraire, désiré se marier à minuit, aux flambeaux ; mais le père Rouault ne comprit rien à cette idée. Il y eut donc une noce, où vinrent quarante-trois personnes, où l’on resta seize heures à table, qui recommença le lendemain et quelque peu les jours suivants. |
Chapter Three One morning old Rouault brought Charles the money for setting his leg — seventy-five francs in forty-sou pieces, and a turkey. He had heard of his loss, and consoled him as well as he could. “I know what it is,” said he, clapping him on the shoulder; “I’ve been through it. When I lost my dear departed, I went into the fields to be quite alone. I fell at the foot of a tree; I cried; I called on God; I talked nonsense to Him. I wanted to be like the moles that I saw on the branches, their insides swarming with worms, dead, and an end of it. And when I thought that there were others at that very moment with their nice little wives holding them in their embrace, I struck great blows on the earth with my stick. I was pretty well mad with not eating; the very idea of going to a cafe disgusted me — you wouldn’t believe it. Well, quite softly, one day following another, a spring on a winter, and an autumn after a summer, this wore away, piece by piece, crumb by crumb; it passed away, it is gone, I should say it has sunk; for something always remains at the bottom as one would say — a weight here, at one’s heart. But since it is the lot of all of us, one must not give way altogether, and, because others have died, want to die too. You must pull yourself together, Monsieur Bovary. It will pass away. Come to see us; my daughter thinks of you now and again, d’ye know, and she says you are forgetting her. Spring will soon be here. We’ll have some rabbit-shooting in the warrens to amuse you a bit.” Charles followed his advice. He went back to the Bertaux. He found all as he had left it, that is to say, as it was five months ago. The pear trees were already in blossom, and Farmer Rouault, on his legs again, came and went, making the farm more full of life. Thinking it his duty to heap the greatest attention upon the doctor because of his sad position, he begged him not to take his hat off, spoke to him in an undertone as if he had been ill, and even pretended to be angry because nothing rather lighter had been prepared for him than for the others, such as a little clotted cream or stewed pears. He told stories. Charles found himself laughing, but the remembrance of his wife suddenly coming back to him depressed him. Coffee was brought in; he thought no more about her. He thought less of her as he grew accustomed to living alone. The new delight of independence soon made his loneliness bearable. He could now change his meal-times, go in or out without explanation, and when he was very tired stretch himself at full length on his bed. So he nursed and coddled himself and accepted the consolations that were offered him. On the other hand, the death of his wife had not served him ill in his business, since for a month people had been saying, “The poor young man! what a loss!” His name had been talked about, his practice had increased; and moreover, he could go to the Bertaux just as he liked. He had an aimless hope, and was vaguely happy; he thought himself better looking as he brushed his whiskers before the looking-glass. One day he got there about three o’clock. Everybody was in the fields. He went into the kitchen, but did not at once catch sight of Emma; the outside shutters were closed. Through the chinks of the wood the sun sent across the flooring long fine rays that were broken at the corners of the furniture and trembled along the ceiling. Some flies on the table were crawling up the glasses that had been used, and buzzing as they drowned themselves in the dregs of the cider. The daylight that came in by the chimney made velvet of the soot at the back of the fireplace, and touched with blue the cold cinders. Between the window and the hearth Emma was sewing; she wore no fichu; he could see small drops of perspiration on her bare shoulders. After the fashion of country folks she asked him to have something to drink. He said no; she insisted, and at last laughingly offered to have a glass of liqueur with him. So she went to fetch a bottle of curacao from the cupboard, reached down two small glasses, filled one to the brim, poured scarcely anything into the other, and, after having clinked glasses, carried hers to her mouth. As it was almost empty she bent back to drink, her head thrown back, her lips pouting, her neck on the strain. She laughed at getting none of it, while with the tip of her tongue passing between her small teeth she licked drop by drop the bottom of her glass. She sat down again and took up her work, a white cotton stocking she was darning. She worked with her head bent down; she did not speak, nor did Charles. The air coming in under the door blew a little dust over the flags; he watched it drift along, and heard nothing but the throbbing in his head and the faint clucking of a hen that had laid an egg in the yard. Emma from time to time cooled her cheeks with the palms of her hands, and cooled these again on the knobs of the huge fire-dogs. She complained of suffering since the beginning of the season from giddiness; she asked if sea-baths would do her any good; she began talking of her convent, Charles of his school; words came to them. They went up into her bedroom. She showed him her old music-books, the little prizes she had won, and the oak-leaf crowns, left at the bottom of a cupboard. She spoke to him, too, of her mother, of the country, and even showed him the bed in the garden where, on the first Friday of every month, she gathered flowers to put on her mother’s tomb. But the gardener they had never knew anything about it; servants are so stupid! She would have dearly liked, if only for the winter, to live in town, although the length of the fine days made the country perhaps even more wearisome in the summer. And, according to what she was saying, her voice was clear, sharp, or, on a sudden all languor, drawn out in modulations that ended almost in murmurs as she spoke to herself, now joyous, opening big naive eyes, then with her eyelids half closed, her look full of boredom, her thoughts wandering. Going home at night, Charles went over her words one by one, trying to recall them, to fill out their sense, that he might piece out the life she had lived before he knew her. But he never saw her in his thoughts other than he had seen her the first time, or as he had just left her. Then he asked himself what would become of her — if she would be married, and to whom! Alas! Old Rouault was rich, and she! — so beautiful! But Emma’s face always rose before his eyes, and a monotone, like the humming of a top, sounded in his ears, “If you should marry after all! If you should marry!” At night he could not sleep; his throat was parched; he was athirst. He got up to drink from the water-bottle and opened the window. The night was covered with stars, a warm wind blowing in the distance; the dogs were barking. He turned his head towards the Bertaux. Thinking that, after all, he should lose nothing, Charles promised himself to ask her in marriage as soon as occasion offered, but each time such occasion did offer the fear of not finding the right words sealed his lips. Old Rouault would not have been sorry to be rid of his daughter, who was of no use to him in the house. In his heart he excused her, thinking her too clever for farming, a calling under the ban of Heaven, since one never saw a millionaire in it. Far from having made a fortune by it, the good man was losing every year; for if he was good in bargaining, in which he enjoyed the dodges of the trade, on the other hand, agriculture properly so called, and the internal management of the farm, suited him less than most people. He did not willingly take his hands out of his pockets, and did not spare expense in all that concerned himself, liking to eat well, to have good fires, and to sleep well. He liked old cider, underdone legs of mutton, glorias well beaten up. He took his meals in the kitchen alone, opposite the fire, on a little table brought to him all ready laid as on the stage. When, therefore, he perceived that Charles’s cheeks grew red if near his daughter, which meant that he would propose for her one of these days, he chewed the cud of the matter beforehand. He certainly thought him a little meagre, and not quite the son-in-law he would have liked, but he was said to be well brought-up, economical, very learned, and no doubt would not make too many difficulties about the dowry. Now, as old Rouault would soon be forced to sell twenty-two acres of “his property,” as he owed a good deal to the mason, to the harness-maker, and as the shaft of the cider-press wanted renewing, “If he asks for her,” he said to himself, “I’ll give her to him.” At Michaelmas Charles went to spend three days at the Bertaux. The last had passed like the others in procrastinating from hour to hour. Old Rouault was seeing him off; they were walking along the road full of ruts; they were about to part. This was the time. Charles gave himself as far as to the corner of the hedge, and at last, when past it — “Monsieur Rouault,” he murmured, “I should like to say something to you.” They stopped. Charles was silent. “Well, tell me your story. Don’t I know all about it?” said old Rouault, laughing softly. “Monsieur Rouault — Monsieur Rouault,” stammered Charles. “I ask nothing better”, the farmer went on. “Although, no doubt, the little one is of my mind, still we must ask her opinion. So you get off — I’ll go back home. If it is “yes”, you needn’t return because of all the people about, and besides it would upset her too much. But so that you mayn’t be eating your heart, I’ll open wide the outer shutter of the window against the wall; you can see it from the back by leaning over the hedge.” And he went off. Charles fastened his horse to a tree; he ran into the road and waited. Half an hour passed, then he counted nineteen minutes by his watch. Suddenly a noise was heard against the wall; the shutter had been thrown back; the hook was still swinging. The next day by nine o’clock he was at the farm. Emma blushed as he entered, and she gave a little forced laugh to keep herself in countenance. Old Rouault embraced his future son-in-law. The discussion of money matters was put off; moreover, there was plenty of time before them, as the marriage could not decently take place till Charles was out of mourning, that is to say, about the spring of the next year. The winter passed waiting for this. Mademoiselle Rouault was busy with her trousseau. Part of it was ordered at Rouen, and she made herself chemises and nightcaps after fashion-plates that she borrowed. When Charles visited the farmer, the preparations for the wedding were talked over; they wondered in what room they should have dinner; they dreamed of the number of dishes that would be wanted, and what should be entrees. Emma would, on the contrary, have preferred to have a midnight wedding with torches, but old Rouault could not understand such an idea. So there was a wedding at which forty-three persons were present, at which they remained sixteen hours at table, began again the next day, and to some extent on the days following. |
Drittes Kapitel Eines Vormittags erschien Vater Rouault und brachte das Honorar für den behandelten Beinbruch: fünfundsiebzig Franken in blanken Talern und eine Truthenne. Er hatte Karls Unglück erfahren und tröstete ihn, so gut er konnte. „Ich weiß, wie einem da zumute ist!“ sagte er, indem er dem Witwer auf die Schulter klopfte. „Habs ja selber mal durchgemacht, ganz so wie Sie! Als ich meine Selige begraben hatte, da lief ich hinaus ins Freie, um allein für mich zu sein. Ich warf mich im Walde hin und weinte mich aus. Fing an, mit dem lieben Gott zu hadern, und machte ihm die dümmsten Vorwürfe. An einem Aste sah ich einen verreckten Maulwurf hängen, dem der Bauch von Würmern wimmelte. Ich beneidete den Kadaver! Und wenn ich daran dachte, daß im selben Augenblicke andre Männer mit ihren netten kleinen Frauen zusammen waren und sie an sich drückten, schlug ich mit meinem Stocke wild um mich. Es war sozusagen nicht mehr ganz richtig mit mir. Ich aß nicht mehr. Der bloße Gedanke, in ein Kaffeehaus zu gehn, ekelte mich an. Glauben Sie mir das! Na, und so nach und nach im Gang der Zeiten, wie so der Frühling dem Winter und der Herbst dem Sommer folgte, da gings eins, zwei, drei, und weg war der Jammer! Weg! Hinunter! Das ist das richtige Wort: hinunter! Denn ganz kriegt man ja so was im ganzen Leben nicht los. Da tief drinnen in der Brust bleibt immer was stecken. Aber Luft kriegt man wieder! Sehen Sie, das ist nun einmal unser aller Schicksal, und deshalb darf man nicht gleich die Flinte ins Korn werfen. Man darf nicht sterben wollen, weil andere gestorben sind. Auch Sie müssen sich aufrappeln, Herr Bovary! Es geht alles vorüber! Besuchen Sie uns! Sie wissen ja, meine Emma denkt oft an Sie. Sie hätten uns vergessen, meint sie. Es wird nun Frühling. Zerstreuen Sie sich ein bißchen bei uns. Schießen Sie ein paar Karnickel auf meinem Revier!“ Karl befolgte seinen Rat. Er kam wieder nach Bertaux und fand da alles wie einst, das heißt wie vor fünf Monaten. Die Birnbäume hatten schon Blüten, und der treffliche Vater Rouault war wieder mordsgesund und von früh bis abend auf den Beinen. Und im ganzen Gut war mächtiger Betrieb. Es war ihm eine Ehrensache, den Arzt mit der erdenklichsten Rücksicht auf sein Leid zu behandeln. Er bat ihn, sichs so bequem wie nur möglich zu machen, sprach im Flüstertone mit ihm wie mit einem Genesenden, und er war sichtlich außer sich, wenn man des Gastes wegen nicht, wie befohlen, die leichtverdaulichsten Gerichte auf den Tisch brachte, zum Beispiel feine Eierspeisen oder gedünstete Birnen. Er erzählte Anekdoten und Abenteuer. Zu seiner eignen Verwunderung lachte Karl. Aber mir einem Male erinnerte er sich seiner Frau und wurde nachdenklich. Der Kaffee ward gebracht, und da vergaß er sie wieder. Je mehr er sich an sein Witwertum gewöhnte, um so weniger gedachte er der Verstorbenen. Das angenehme, ihm neue Bewußtsein, unabhängig zu sein, machte ihm die Einsamkeit bald erträglicher. Jetzt durfte er die Stunden der Mahlzeiten selber bestimmen, konnte gehen und kommen, ohne Rechenschaft darüber geben zu müssen, und wenn er müde war, alle vier von sich strecken und sich in seinem Bette breit machen. Er hegte und pflegte sich und ließ alle Tröstungen über sich ergehen. Übrigens hatte der Tod seiner Frau keine ungünstige Wirkung auf seinen Beruf als Arzt. Indem man wochenlang in einem fort sagte: „Der arme Doktor. Wie traurig!“ blieb sein Name im Munde der Leute. Seine Praxis vergrößerte sich. Und dann konnte er nun nach Bertaux reiten, wann es ihm beliebte. Eine unbestimmbare Sehnsucht wuchs in ihm auf, ein namenloses Glücksgefühl. Wenn er sich im Spiegel betrachtete und sich den Bart strich, fand er sich gar nicht übel. Eines schönen Tages kam er nachmittags gegen drei Uhr im Gute angeritten. Alles war draußen auf dem Felde. Er betrat die Küche. Emma war drinnen, aber er bemerkte sie zunächst nicht. Die Fensterläden waren geschlossen. Durch die Ritzen des Holzes stachen die Sonnenstrahlen mit langen dünnen Nadeln auf die Fliesen, oder sie brachen sich an den Kanten der Möbel entzwei und wirbelten hinauf zur Decke. Auf dem Küchentische krabbelten Fliegen an den Gläsern hinauf, purzelten summend in die Apfelweinneigen und ertranken. Das Sonnenlicht, das durch den Kamin eindrang, verwandelte die rußige Herdplatte in eine Samtfläche und färbte den Aschehaufen blau. Emma saß zwischen dem Fenster und dem Herd und nähte. Sie hatte kein Halstuch um, und auf ihren entblößten Schultern glänzten kleine Schweißperlen. Nach ländlichem Brauch bot sie dem Ankömmling einen Trunk an. Als er ihn ausschlug, nötigte sie ihn, und schließlich bat sie ihn lachend, ein Gläschen Likör mit ihr zu trinken. Sie holte aus dem Schranke eine Flasche Curaçao, suchte zwei Gläser heraus, füllte das eine bis zum Rande und goß in das andre ein paar Tropfen. Sie stieß mit Karl an und führte dann ihr Glas zum Munde. Da soviel wie nichts drin war, mußte sie sich beim Trinken zurückbiegen. Den Kopf nach hinten gelegt, die Lippen zugespitzt, den Hals gestrafft, so stand sie da und lachte darüber, daß ihr nichts auf die Zunge lief, obgleich diese mit der Spitze aus den feinen Zähnen herausspazierte und bis an den Boden des Glases mehreremals suchend vorstieß. Emma nahm wieder Platz und begann sich von neuem ihrer Handarbeit zu widmen. Ein weißer baumwollener Strumpf war zu stopfen. Mit gesenkter Stirn saß sie da. Sie sagte nichts und Karl erst recht nichts. Der Luftzug, der sich zwischen Tür und Schwelle eindrängte, wirbelte ein wenig Staub von den Fliesen auf. Karl sah diesem Tanze der Atome zu. Dabei hörte er nichts als das Hämmern seines Blutes im eignen Hirne und aus der Ferne das Gackern einer Henne, die irgendwo im Hofe ein Ei gelegt hatte. Hin und wieder hielt Emma die Handflächen ihrer Hände auf den kalten Knauf der Herdstange und preßte sie dann an ihre Wangen, um diese zu kühlen. Sie klagte über die Schwindelanfälle, von denen sie seit Frühjahrsanfang heimgesucht wurde, und fragte, ob ihr wohl Seebäder dienlich wären. Dann plauderte sie von ihrem Aufenthalt im Kloster und er von seiner Gymnasiastenzeit. So gerieten sie in ein Gespräch. Sie führte ihn in ihr Zimmer und zeigte ihm ihre Notenhefte von damals und die niedlichen Bücher, die sie als Schulprämien bekommen hatte, und die Eichenlaubkränze, die im untersten Schrankfache ihr Dasein fristeten. Dann erzählte sie von ihrer Mutter, von deren Grabe, und zeigte ihm sogar im Garten das Beet, wo die Blumen wüchsen, die sie der Toten jeden ersten Freitag im Monat hintrug. Der Gärtner, den sie hatten, verstünde nichts. Mit dem seien sie schlecht dran. Ihr Wunsch wäre es, wenigstens während der Wintermonate in der Stadt zu wohnen. Dann aber meinte sie wieder, an den langen Sommertagen sei das Leben auf dem Lande noch langweiliger. Und je nachdem, was sie sagte, klang ihre Stimme hell oder scharf; oder sie nahm plötzlich einen matten Ton an, und wenn sie wie mit sich selbst plauderte, ward sie wieder ganz anders, wie flüsternd und murmelnd. Bald war Emma lustig und hatte große unschuldige Augen, dann wieder schlossen sich ihre Lider zur Hälfte, und ihr schimmernder Blick sah teilnahmslos und traumverloren aus. Abends auf dem Heimritt wiederholte sich Karl alles, was sie geredet hatte, bis ins einzelne, und versuchte den vollen Sinn ihrer Worte zu erfassen. Er wollte sich damit eine Vorstellung von der Existenz schaffen, die Emma geführt, ehe er sie kennen gelernt hatte. Aber es gelang ihm nicht, sie in seinen Gedanken anders zu erschauen als so, wie sie ausgesehen hatte, als er sie zum ersten Male erblickt, oder so, wie er sie eben vor sich gehabt hatte. Dann fragte er sich, wie es wohl würde, wenn sie sich verheiratete, aber mit wem? Ja, ja, mit wem? Ihr Vater war so reich und sie ... so schön! Und immer wieder sah er Emmas Gesicht vor seinen geistigen Augen, und eine Art eintönige Melodie summte ihm durch die Ohren wie das Surren eines Kreisels: „Emma, wenn du dich verheiratetest! Wenn du dich nun verheiratetest!“ In der Nacht konnte er keinen Schlaf finden. Die Kehle war ihm wie zugeschnürt. Er verspürte Durst, stand auf, trank ein Glas Wasser und machte das Fenster auf. Der Himmel stand voller Sterne. Der laue Nachtwind strich in das Zimmer. Fern bellten Hunde. Er wandte den Blick in die Rötung nach Bertaux. Endlich kam er auf den Gedanken, daß es den Hals nicht kosten könne, und so nahm er sich vor, bei der ersten besten Gelegenheit um Emmas Hand zu bitten. Aber sooft sich diese Gelegenheit bot, wollten ihm vor lauter Angst die passenden Worte nicht über die Lippen. Vater Rouault hätte längst nichts dagegen gehabt, wenn ihm jemand seine Tochter geholt hätte. Im Grunde nützte sie ihm in Haus und Hof nicht viel. Er machte ihr keinen Vorwurf daraus: sie war eben für die Landwirtschaft zu geweckt. „Ein gottverdammtes Gewerbe!“ pflegte er zu schimpfen. „Das hat auch noch keinen zum Millionär gemacht!“ Ihm hatte es in der Tat keine Reichtümer gebracht; im Gegenteil, er setzte alle Jahre zu. Denn wenn er auch auf den Märkten zu seinem Stolz als gerissener Kerl bekannt war, so war er eigentlich doch für Ackerbau und Viehzucht durchaus nicht geschaffen. Er verstand nicht zu wirtschaften. Er nahm nicht gern die Hände aus den Hosentaschen, und seinem eigenen Leibe war er kein Stiefvater. Er hielt auf gut Essen und Trinken, einen warmen Ofen und ausgiebigen Schlaf. Ein gutes Glas Landwein, ein halb durchgebratenes Hammelkotelett und ein Täßchen Mokka mit Kognak gehörten zu den Idealen seines Lebens. Er nahm seine Mahlzeiten in der Küche ein und zwar allein für sich, in der Nähe des Herdfeuers an einem kleinen Tische, der ihm — wie auf der Bühne — fix und fertig gedeckt hereingebracht werden mußte. Als er die Entdeckung machte, daß Karl einen roten Kopf bekam, wenn er Emma sah, war er sich sofort klar, daß früher oder später ein Heiratsantrag zu erwarten war. Alsobald überlegte er sich die Geschichte. Besonders schneidig sah ja Karl Bovary nicht gerade aus, und Rouault hatte sich ehedem seinen künftigen Schwiegersohn ein bißchen anders gedacht, aber er war doch als anständiger Kerl bekannt, sparsam und tüchtig in seinem Berufe. Und zweifellos würde er wegen der Mitgift nicht lange feilschen. Vater Rouault hatte gerade eine Menge großer Ausgaben. Um allerlei Handwerker zu bezahlen, sah er sich gezwungen, zweiundzwanzig Acker von seinem Grund und Boden zu verkaufen. Die Kelter mußte auch erneuert werden. Und so sagte er sich: „Wenn er um Emma anhält, soll er sie kriegen!“ Zur Weinlese war Karl drei Tage lang da. Aber Tag verging auf Tag und Stunde auf Stunde, ohne daß Karls Wille zur Tat ward. Rouault gab ihm ein kleines Stück Wegs das Geleite; am Ende des Hohlwegs vor dem Dorfe pflegte er sich von seinem Gaste zu verabschieden. Das war also der Moment! Karl nahm sich noch Zeit bis zuallerletzt. Erst als die Hecke hinter ihnen lag, stotterte er los: „Verehrter Herr Rouault, ich möchte Ihnen gern etwas sagen!“ Weiter brachte er nichts heraus. Die beiden Männer blieben stehen. „Na, raus mit der Sprache! Ich kann mirs schon denken!“ Rouault lachte gemütlich. „Vater Rouault! Vater Rouault!“ stammelte Karl. „Meinen Segen sollen Sie haben!“ fuhr der Gutspächter fort. „Meine Kleine denkt gewiß nicht anders als ich, aber gefragt werden muß sie. Reiten Sie getrost nach Hause. Ich werde sie gleich mal ins Gebet nehmen. Wenn sie Ja sagt, — wohlverstanden! — brauchen Sie jedoch nicht umzukehren. Wegen der Leute nicht, und auch weil sie sich erst ein bißchen beruhigen soll. Damit Sie aber nicht zu lange Blut schwitzen, will ich Ihnen ein Zeichen geben: ich werde einen Fensterladen gegen die Mauer klappen lassen. Wenn Sie da oben über die Hecke gucken, können Sie das ungesehen beobachten!“ Damit ging er. Karl band seinen Schimmel an einen Baum; kletterte die Böschung hinauf und stellt sich auf die Lauer, die Taschenuhr in der Hand. Eine halbe Stunde verstrich — und dann noch neunzehn Minuten ... Da gab es mit einem Male einen Schlag gegen die Mauer. Der Laden blieb sperrangelweit offen und wackelte noch eine Weile. Am andern Morgen war Karl vor neun Uhr in Bertaux. Emma wurde über und über rot, als sie ihn sah. Sie lächelte gezwungen ein wenig, um ihre Fassung zu bewahren. Rouault umarmte seinen künftigen Schwiegersohn. Die Besprechung der geschäftlichen Punkte wurde verschoben. Übrigens war noch viel Zeit dazu, da die Hochzeit anstandshalber vor Ablauf von Karls Trauerjahr nicht stattfinden konnte, das hieß, nicht vor dem nächsten Frühjahr. In dieser Erwartung verging der Winter. Fräulein Rouault beschäftigte sich mit ihrer Aussteuer. Ein Teil davon wurde in Rouen bestellt. Die Hemden und Hauben stellte sie nach Schnitten, die sie sich lieh, selbst her. Wenn Karl zu Besuch kam, plauderte das Brautpaar von den Vorbereitungen zur Hochzeitsfeier. Es wurde überlegt, in welchem Raume das Festmahl stattfinden, wieviel Platten und Schüsseln auf die Tafel kommen und was für Vorspeisen es geben solle. Am liebsten hätte es Emma gehabt, wenn die Trauung auf nachts zwölf Uhr bei Fackelschein festgesetzt worden wäre; aber für solche Romantik hatte Vater Rouault kein Verständnis. Man einigte sich also auf eine Hochzeitsfeier, zu der dreiundvierzig Gäste Einladungen bekamen. Sechzehn Stunden wollte man bei Tisch sitzen bleiben. Am nächsten Tage und an den folgenden sollte es so weitergehen. |