Paul Valéry | cette essence d'aurore, toute de brise et de feuilles frissonnantes

Un passage délicieux de Parsifal. A l'aurore, après une nuit infinie de tourment et de désespoir, le Roi Amfortas que torture une plaie équivoque, mystérieusement infligée par la volupté à son âme, à sa chair, indivisément punies, fait porter sa litière dans la campagne. L'Impur vient respirer la fraîcheur du matin. Ce ne sont que quelques mesures, mais incomparables. Peut-être, cette essence d'aurore, toute de brise et de feuilles frissonnantes, obtenue, saisie à miracle par Richard Wagner, merveille sans retour insinuée par lui dans une oeuvre énorme toute fondée sur la redite éternelle de thèmes hiératiques, implique-t-elle encore plus d'expérience et de science, et plus assimilée, - une plus profonde transformation d'un homme en maître de son art, que la vaste somme de l'ouvrage ?

Paul Valéry, Autour de Corot, 1932, Pièces sur l'art, Pléiade, Oeuvres II, page 1315

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