Nietzsche | Also sprach Zarathustra | 15 - Vom Freunde / De l’ami

 

Vom Freunde.

„Einer ist immer zu viel um mich“ — also denkt der Einsiedler. „Immer Einmal Eins — das giebt auf die Dauer Zwei!“

Ich und Mich sind immer zu eifrig im Gespräche: wie wäre es auszuhalten, wenn es nicht einen Freund gäbe?

Immer ist für den Einsiedler der Freund der Dritte: der Dritte ist der Kork, der verhindert, dass das Gespräch der Zweie in die Tiefe sinkt.

Ach, es giebt zu viele Tiefen für alle Einsiedler. Darum sehnen sie sich so nach einem Freunde und nach seiner Höhe.

Unser Glaube an Andre verräth, worin wir gerne an uns selber glauben möchten. Unsre Sehnsucht nach einem Freunde ist unser Verräther.

Und oft will man mit der Liebe nur den Neid überspringen. Und oft greift man an und macht sich einen Feind, um zu verbergen, dass man angreifbar ist.

„Sei wenigstens mein Feind!“ — so spricht die wahre Ehrfurcht, die nicht um Freundschaft zu bitten wagt.

Will man einen Freund haben, so muss man auch für ihn Krieg führen wollen: und um Krieg zu führen, muss man Feind sein können.

Man soll in seinem Freunde noch den Feind ehren. Kannst du an deinen Freund dicht herantreten, ohne zu ihm überzutreten?

In seinem Freunde soll man seinen besten Feind haben. Du sollst ihm am nächsten mit dem Herzen sein, wenn du ihm widerstrebst.

Du willst vor deinem Freunde kein Kleid tragen? Es soll deines Freundes Ehre sein, dass du dich ihm giebst, wie du bist? Aber er wünscht dich darum zum Teufel!

Wer aus sich kein Hehl macht, empört: so sehr habt ihr Grund, die Nacktheit zu fürchten! Ja, wenn ihr Götter wäret, da dürftet ihr euch eurer Kleider schämen!

Du kannst dich für deinen Freund nicht schön genug putzen: denn du sollst ihm ein Pfeil und eine Sehnsucht nach dem Übermenschen sein.

Sahst du deinen Freund schon schlafen, — damit du erfahrest, wie er aussieht? Was ist doch sonst das Gesicht deines Freundes? Es ist dein eignes Gesicht, auf einem rauhen und unvollkommnen Spiegel.

Sahst du deinen Freund schon schlafen? Erschrakst du nicht, dass dein Freund so aussieht? Oh, mein Freund, der Mensch ist Etwas, das überwunden werden muss.

Im Errathen und Stillschweigen soll der Freund Meister sein: nicht Alles musst du sehn wollen. Dein Traum soll dir verrathen, was dein Freund im Wachen thut.

Ein Errathen sei dein Mitleiden: dass du erst wissest, ob dein Freund Mitleiden wolle. Vielleicht liebt er an dir das ungebrochne Auge und den Blick der Ewigkeit.

Das Mitleiden mit dem Freunde berge sich unter einer harten Schale, an ihm sollst du dir einen Zahn ausbeissen. So wird es seine Feinheit und Süsse haben.

Bist du reine Luft und Einsamkeit und Brod und Arznei deinem Freunde? Mancher kann seine eignen Ketten nicht lösen und doch ist er dem Freunde ein Erlöser.

Bist du ein Sclave? So kannst du nicht Freund sein. Bist du ein Tyrann? So kannst du nicht Freunde haben.

Allzulange war im Weibe ein Sclave und ein Tyrann versteckt. Desshalb ist das Weib noch nicht der Freundschaft fähig: es kennt nur die Liebe.

In der Liebe des Weibes ist Ungerechtigkeit und Blindheit gegen Alles, was es nicht liebt. Und auch in der wissenden Liebe des Weibes ist immer noch Überfall und Blitz und Nacht neben dem Lichte.

Noch ist das Weib nicht der Freundschaft fähig: Katzen sind immer noch die Weiber, und Vögel. Oder, besten Falles, Kühe.

Noch ist das Weib nicht der Freundschaft fähig. Aber sagt mir, ihr Männer, wer von euch ist denn fähig der Freundschaft?

Oh über eure Armuth, ihr Männer, und euren Geiz der Seele! Wie viel ihr dem Freunde gebt, das will ich noch meinem Feinde geben, und will auch nicht ärmer damit geworden sein.

Es giebt Kameradschaft: möge es Freundschaft geben!

Also sprach Zarathustra.

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-- Traduction française, par Henri Albert --

De l’ami

« Un seul est toujours de trop autour de moi, » — ainsi pense le solitaire. « Toujours une fois un — cela finit par faire deux ! »

Je et Moi sont toujours en conversation trop assidue : comment supporterait-on cela s’il n’y avait pas un ami ?

Pour le solitaire, l’ami est toujours le troisième : le troisième est le liège qui empêche le colloque des deux autres de s’abîmer dans les profondeurs.

Hélas ! il y a trop de profondeurs pour tous les solitaires. C’est pourquoi ils aspirent à un ami et à la hauteur d’un ami.

Notre foi en les autres découvre l’objet de notre foi en nous-mêmes. Notre désir d’un ami révèle notre pensée.

L’amour ne sert souvent qu’à passer sur l’envie. Souvent l’on attaque et l’on se fait des ennemis pour cacher que l’on est soi-même attaquable.

« Sois au moins mon ennemi ! » — ainsi parle le respect véritable, celui qui n’ose pas solliciter l’amitié.
Si l’on veut avoir un ami il faut aussi vouloir faire la guerre pour lui : et pour la guerre, il faut pouvoir être ennemi.

Il faut honorer l’ennemi dans l’ami. Peux-tu t’approcher de ton ami, sans passer à son bord ?

En son ami on doit voir son meilleur ennemi. C’est quand tu luttes contre lui que tu dois être le plus près de son cœur.

Tu ne veux pas dissimuler devant ton ami ? Tu veux faire honneur à ton ami en te donnant tel que tu es ? Mais c’est pourquoi il t’envoie au diable !

Qui ne sait se dissimuler révolte : voilà pourquoi il faut craindre la nudité ! Certes, si vous étiez des dieux vous pourriez avoir honte de vos vêtements !

Tu ne saurais assez bien t’habiller pour ton ami : car tu dois lui être une flèche et un désir du Surhumain.

As-tu déjà vu dormir ton ami, — pour que tu apprennes à connaître son aspect ? Quel est donc le visage de ton ami ? C’est ton propre visage dans un miroir grossier et imparfait.

As-tu déjà vu dormir ton ami ? Ne t’es-tu pas effrayé de l’air qu’il avait ? Oh ! mon ami, l’homme est quelque chose qui doit être surmonté.

L’ami doit être passé maître dans la divination et dans le silence : tu ne dois pas vouloir tout voir. Ton rêve doit te révéler ce que fait ton ami quand il est éveillé.

Il faut que ta pitiié soit une divination : afin que tu saches d’abord si ton ami veut de la pitié. Peut-être aime-t-il en toi le visage fier et le regard de l’éternité.

Il faut que la compassion avec l’ami se cache sous une rude enveloppe, et que tu y laisses une dent. Ainsi ta compassion sera pleine de finesses et de douceurs.

Es-tu pour ton ami air pur et solitude, pain et médicament ? Il y en a qui ne peuvent pas se libérer de leur propre chaîne, et pourtant, pour leurs amis, ils sont des sauveurs.

Si tu es un esclave tu ne peux pas être un ami. Si tu es un tyran tu ne peux pas avoir d’amis.

Pendant trop longtemps un esclave et un tyran étaient cachés dans la femme. C’est pourquoi la femme n’est pas encore capable d’amitié : elle ne connaît que l’amour.

Dans l’amour de la femme il y a de l’injustice et de l’aveuglement à l’égard de tout ce qu’elle n’aime pas. Et même dans l’amour conscient de la femme il y a toujours, à côté de la lumière, la surprise, l’éclair et la nuit.

La femme n’est pas encore capable d’amitié. Des chattes, voilà ce que sont toujours les femmes, des chattes et des oiseaux. Ou, quand cela va bien, des vaches.

La femme n’est pas encore capable d’amitié. Mais, dites-moi, vous autres hommes, lequel d’entre vous est donc capable d’amitié ?

Malédiction sur votre pauvreté et votre avarice de l’âme, ô hommes ! Ce que vous donnez à vos amis, je veux le donner même à mes ennemis, sans en devenir plus pauvre.

Il y a de la camaraderie : qu’il y ait de l’amitié !

Ainsi parlait Zarathoustra.

 

Edition bilingue
Texte original allemand suivi de la traduction française