Nietzsche | Also sprach Zarathustra | 22 - Vom freien Tode / De la mort volontaire

 

Vom freien Tode.

Viele sterben zu spät, und Einige sterben zu früh. Noch klingt fremd die Lehre: „stirb zur rechten Zeit!“

Stirb zur rechten Zeit: also lehrt es Zarathustra.

Freilich, wer nie zur rechten Zeit lebt, wie sollte der je zur rechten Zeit sterben? Möchte er doch nie geboren sein! — Also rathe ich den Überflüssigen.

Aber auch die Überflüssigen thun noch wichtig mit ihrem Sterben, und auch die hohlste Nuss will noch geknackt sein.

Wichtig nehmen Alle das Sterben: aber noch ist der Tod kein Fest. Noch erlernten die Menschen nicht, wie man die schönsten Feste weiht.

Den vollbringenden Tod zeige ich euch, der den Lebenden ein Stachel und ein Gelöbniss wird.

Seinen Tod stirbt der Vollbringende, siegreich, umringt von Hoffenden und Gelobenden.

Also sollte man sterben lernen; und es sollte kein Fest geben, wo ein solcher Sterbender nicht der Lebenden Schwüre weihte!

Also zu sterben ist das Beste; das Zweite aber ist: im Kampfe zu sterben und eine grosse Seele zu verschwenden.

Aber dem Kämpfenden gleich verhasst wie dem Sieger ist euer grinsender Tod, der heranschleicht wie ein Dieb — und doch als Herr kommt.

Meinen Tod lobe ich euch, den freien Tod, der mir kommt, weil ich will.

Und wann werde ich wollen? — Wer ein Ziel hat und einen Erben, der will den Tod zur rechten Zeit für Ziel und Erben.

Und aus Ehrfurcht vor Ziel und Erben wird er keine dürren Kränze mehr im Heiligthum des Lebens aufhängen.

Wahrlich, nicht will ich den Seildrehern gleichen: sie ziehen ihren Faden in die Länge und gehen dabei selber immer rückwärts.

Mancher wird auch für seine Wahrheiten und Siege zu alt; ein zahnloser Mund hat nicht mehr das Recht zu jeder Wahrheit.

Und Jeder, der Ruhm haben will, muss sich bei Zeiten von der Ehre verabschieden und die schwere Kunst üben, zur rechten Zeit zu — gehn.

Man muss aufhören, sich essen zu lassen, wenn man am besten schmeckt: das wissen Die, welche lange geliebt werden wollen.

Saure Äpfel giebt es freilich, deren Loos will, dass sie bis auf den letzten Tag des Herbstes warten: und zugleich werden sie reif, gelb und runzelig.

Andern altert das Herz zuerst und Andern der Geist. Und Einige sind greis in der Jugend: aber spät jung erhält lang jung.

Manchem missräth das Leben: ein Giftwurm frisst sich ihm an’s Herz. So möge er zusehn, dass ihm das Sterben um so mehr gerathe.

Mancher wird nie süss, er fault im Sommer schon. Feigheit ist es, die ihn an seinem Aste festhält.

Viel zu Viele leben und viel zu lange hängen sie an ihren Ästen. Möchte ein Sturm kommen, der all diess Faule und Wurmfressne vom Baume schüttelt!

Möchten Prediger kommen des schnellen Todes! Das wären mir die rechten Stürme und Schüttler an Lebensbäumen! Aber ich höre nur den langsamen Tod predigen und Geduld mit allem „Irdischen“.

Ach, ihr predigt Geduld mit dem Irdischen? Dieses Irdische ist es, das zu viel Geduld mit euch hat, ihr Lästermäuler!

Wahrlich, zu früh starb jener Hebräer, den die Prediger des langsamen Todes ehren: und Vielen ward es seitdem zum Verhängniss, dass er zu früh starb.

Noch kannte er nur Thränen und die Schwermuth des Hebräers, sammt dem Hasse der Guten und Gerechten, — der Hebräer Jesus: da überfiel ihn die Sehnsucht zum Tode.

Wäre er doch in der Wüste geblieben und ferne von den Guten und Gerechten! Vielleicht hätte er leben gelernt und die Erde lieben gelernt — und das Lachen dazu!

Glaubt es mir, meine Brüder! Er starb zu früh; er selber hätte seine Lehre widerrufen, wäre er bis zu meinem Alter gekommen! Edel genug war er zum Widerrufen!

Aber ungereift war er noch. Unreif liebt der Jüngling und unreif hasst er auch Mensch und Erde. Angebunden und schwer ist ihm noch Gemüth und Geistesflügel.

Aber im Manne ist mehr Kind als im Jünglinge, und weniger Schwermuth: besser versteht er sich auf Tod und Leben.

Frei zum Tode und frei im Tode, ein heiliger Nein-sager, wenn es nicht Zeit mehr ist zum Ja: also versteht er sich auf Tod und Leben.

Dass euer Sterben keine Lästerung sei auf Mensch und Erde, meine Freunde: das erbitte ich mir von dem Honig eurer Seele.

In eurem Sterben soll noch euer Geist und eure Tugend glühn, gleich einem Abendroth um die Erde: oder aber das Sterben ist euch schlecht gerathen.

Also will ich selber sterben, dass ihr Freunde um meinetwillen die Erde mehr liebt; und zur Erde will ich wieder werden, dass ich in Der Ruhe habe, die mich gebar.

Wahrlich, ein Ziel hatte Zarathustra, er warf seinen Ball: nun seid ihr Freunde meines Zieles Erbe, euch werfe ich den goldenen Ball zu.

Lieber als Alles sehe ich euch, meine Freunde, den goldenen Ball werfen! Und so verziehe ich noch ein Wenig auf Erden: verzeiht es mir!

Also sprach Zarathustra.

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-- Traduction française, par Henri Albert --

De la mort volontaire

Il y en a beaucoup qui meurent trop tard et quelques-uns qui meurent trop tôt. La doctrine qui dit : « Meurs à temps ! » semble encore étrange.

Meurs à temps : voilà ce qu’enseigne Zarathoustra.

Il est vrai que celui qui n’a jamais vécu à temps ne saurait mourir à temps. Qu’il ne soit donc jamais né ! — Voilà ce que je conseille aux superflus.

Mais les superflus eux-mêmes font les importants avec leur mort, et la noix la plus creuse prétend être cassée.

Ils accordent tous de l’importance à la mort : mais pour eux la mort n’est pas encore une fête. Les hommes ne savent point encore comment on consacre les plus belles fêtes.

Je vous montre la mort qui consacre, la mort qui, pour les vivants, devient un aiguillon et une promesse.
L’accomplisseur meurt de sa mort, victorieux, entouré de ceux qui espèrent et qui promettent.

C’est ainsi qu’il faudrait apprendre à mourir ; et il ne devrait pas y avoir de fête, sans qu’un tel mourant ne sanctifie les serments des vivants !

Mourir ainsi est la meilleure chose ; mais la seconde est celle-ci : mourir au combat et répandre une grande âme.

Mais haïe tant par le combattant que par le victorieux est votre mort grimaçante qui s’avance en rampant, comme un voleur — et qui pourtant vient en maître.

Je vous fait l’éloge de ma mort, de la mort volontaire, qui me vient puisque je veux.

Et quand voudrais-je ? — Celui qui a un but et un héritier, veut pour but et héritier la mort à temps.

Et, par respect pour le but et l’héritier, il ne suspendra plus de couronnes fanées dans le sanctuaire de la vie.

En vérité, je ne veux pas ressembler aux cordiers : ils tirent leur fils en longueur et vont eux-mêmes toujours en arrière.

Il y en a aussi qui deviennent trop vieux pour leurs vérités et leurs victoires ; une bouche édentée n’a plus droit à toutes les vérités.

Et tous ceux qui cherchent la gloire doivent au bon moment prendre congé de l’honneur, et exercer l’art difficile de s’en aller à temps.

Il faut cesser de se faire manger, au moment où l’on vous trouve le plus de goût : ceux-là le savent qui veulent être aimés longtemps.

Il y a bien aussi des pommes aigres dont la destinée est d’attendre jusqu’au dernier jour de l’automne. Et elles deviennent en même temps mûres, jaunes et ridées.

Chez d’autres le cœur vieillit d’abord, chez d’autres l’esprit. Et quelques-uns sont vieux dans leur jeunesse : mais quand on est jeune très tard, on reste jeune très longtemps.

Il y en a qui manquent leur vie : un ver venimeux leur ronge le cœur. Qu’ils tâchent au moins de mieux réussir dans leur mort.

Il y en a qui ne prennent jamais de saveur, ils pourrissent déjà en été. C’est la lâcheté qui les retient à leur branche.

Il y en a beaucoup trop qui vivent et trop longtemps ils restent suspendus à leur branche. Qu’une tempête vienne et secoue de l’arbre tout ce qui est pourri et mangé par le ver ?

Viennent les prédicateurs de la mort rapide ! Ce seraient eux les vraies tempêtes qui secoueraient l’arbre de la vie ! Mais je n’entends prêcher que la mort lente et la patience avec tout ce qui est « terrestre ».

Hélas ! vous prêchez la patience avec ce qui est terrestre ? C’est le terrestre qui a trop de patience avec vous, blasphémateurs !

En vérité, il est mort trop tôt, cet Hébreu qu’honorent les prédicateurs de la mort lente, et pour un grand nombre, depuis, ce fut une fatalité qu’il mourût trop tôt.

Il ne connaissait encore que les larmes et la tristesse de l’Hébreu, ainsi que la haine des bons et des justes, — cet Hébreu Jésus : et voici que le désir de la mort le saisit à l’improviste.

Pourquoi n’est-il pas resté au désert, loin des bons et des justes ! Peut-être aurait-il appris à vivre et à aimer la terre — et aussi le rire !

Croyez-m’en, mes frères ! Il est mort trop tôt ; il aurait lui-même rétracté sa doctrine, s’il avait vécu jusqu’à mon âge ! Il était assez noble pour se rétracter !

Mais il n’était pas encore mûr. L’amour du jeune homme manque de maturité, voilà pourquoi il hait les hommes et la terre. Chez lui l’âme et les ailes de la pensée sont encore liées et pesantes.

Mais il y a de l’enfant dans l’homme plus que dans le jeune homme, et moins de tristesse : l’homme comprend mieux la mort et la vie.

Libre pour la mort et libre dans la mort, divin négateur, s’il n’est plus temps d’affirmer : ainsi il comprend la vie et la mort.

Que votre mort ne soit pas un blasphème sur l’homme et la terre, ô mes amis : telle est la grâce que j’implore du miel de votre âme.

Que dans votre agonie votre esprit et votre vertu jettent encore une dernière lueur, comme la rougeur du couchant enflamme la terre : si non, votre mort vous aura mal réussi.
C’est ainsi que je veux mourir moi-même, afin que vous aimiez davantage la terre à cause de moi, ô mes amis ; et je veux revenir à la terre pour que je retrouve mon repos en celle qui m’a engendré.

En vérité, Zarathoustra avait un but, il a lancé sa balle ; maintenant, ô mes amis, vous héritez de mon but, c’est à vous que je lance la balle dorée.

Plus que toute autre chose, j’aime à vous voir lancer la balle dorée, ô mes amis ! Et c’est pourquoi je demeure encore un peu sur la terre : pardonnez-le-moi !

Ainsi parlait Zarathoustra.

 

Edition bilingue
Texte original allemand suivi de la traduction française